Le don sur succession, article 788 III du CGI

De quoi s’agit-il ?

 

Le don sur succession, régi par l’article 788 III du Code général des impôts (CGI) permet de recevoir des libéralités tout en étant exonéré de droits de mutation. Instauré par la loi du 1 er août 2003 relative au mécénat, aux associations et aux fondations, le dispositif consiste pour un héritier, légataire ou donataire, à donner une partie de sa part à une association ou fondation reconnue d’utilité publique, laquelle ne paiera pas de droits de succession sur cette libéralité. L’héritier bénéficie quant à lui d’un abattement sur les droits de succession à payer à hauteur du montant du don consenti ou de la valeur des biens remis évalués à la date du décès en cas de don en nature. La libéralité doit être effectuée à titre définitif, en pleine propriété et dans les six mois suivant le décès.

 

Les avis du Think Tank

 

Catherine Bienvenu (Les petits frères des Pauvres) :

Le dispositif de l’article 788 III du CGI est plutôt simple dans son mécanisme, intellectuellement intéressant puisqu’il déroge au droit commun selon lequel un héritier accepte la succession de son auteur ou y renonce, mais dans les deux cas, la décision porte sur sa part, intégrale et indivisible. Avec le don sur succession, l’héritier se décharge d’une partie de la succession, par exemple en raison de son coût de gestion, tout en faisant oeuvre de bienfaisance. Le don peut porter sur une somme d’argent, des biens en nature, mobilier ou immobilier.

Pourtant en pratique ce dispositif reste exceptionnel. D’une part il est encore trop souvent méconnu des notaires qui ne le proposent donc pas. D’autre part les délais de mise en œuvre sont matériellement difficiles à respecter. Le don sur succession doit en effet être formalisé dans les six mois de l’ouverture de la succession. Cela signifie qu’en six mois, la succession doit être ouverte et réglée, les droits évalués, la donation décidée, acceptée et traitée juridiquement. La tâche est quasiment impossible : pour qu’un héritier arbitre sur ce qu’il va garder, il doit avoir une idée claire de la gestion du bien, etc… Il peut se passer plusieurs mois. Lorsque l’héritier se décide à donner un bien immobilier, c’est souvent en raison des défauts du bien.

Pour ces raisons une oeuvre peut ainsi être amenée à ne pas accepter un tel don, notamment s’il est relatif à un bien délicat à évaluer.

Pour rendre à ce mode original de générosité toute son utilité, un allongement du délai de réalisation est nécessaire, voire indispensable lorsqu’il porte sur des biens immobiliers. Le législateur pourrait s’inspirer utilement du mécanisme de la dation en paiement des droits de succession, pour laquelle seule l’offre de dation doit être effectuée dans les 6 mois, ce qui laisse à l’Etat le temps de prendre sa décision d’accepter et de formaliser ce mode de paiement.

 

Bertrand Savouré :

Juridiquement, le don est considéré comme effectué, de façon posthume, par le défunt : le bien ou la somme affectée à la FRUP ne passe pas dans la patrimoine de l’héritier, donataire ou légataire. Cette possibilité de donner une fraction de la succession est a priori intéressante si l’héritier avait préalablement l’intention de donner. Il évite ainsi une taxation sur une fraction du patrimoine dont il va se démettre, tant au regard des droits de succession que de l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF).

A y regarder de plus près, compte tenu du montant des droits, même revu à la hausse par la première loi de Finances rectificative pour 2012, le dispositif ne devient attractif que par comparaison aux avantages fiscaux en matière d’impôt sur le revenu des personnes physiques (IR) et ISF. Notons que pour les conjoints et partenaires de Pacs survivants, le dispositif ne présente aucun caractère incitatif puisque ces intéressés sont exonérés de droits de droits de mutation à titre gratuit.

Comme le don sur succession n’est pas cumulable avec le don IRPP (art. 200 du CGI), une comparaison du « gain fiscal » s’impose. Tout va dépendre du taux moyen d’imposition à l’IR et à l’ISF et du bénéficiaire, ainsi que de celui des droits de succession.

 

Exemple

 

J’hérite de 1 000 euros et suis taxé à 30 % dans la succession. Je reçois donc 700 euros net. Si je veux donner 1 000, je dois me déposséder de 300 sur mon patrimoine personnel. Mais je réalise une économie d’IRPP. 66% par exemple. Si je suis taxé à 41%, l’économie est de 270. Ici, le choix est quasiment neutre. Si le taux de taxation de la succession est inférieur, il vaut mieux « prendre » la succession et donner soi-même.