Dans un contexte politique bousculé, où la défiance gagne les institutions et les imaginaires collectifs, la question du rôle de la philanthropie se pose sous un nouveau prisme. Il n’apparait plus possible de penser la philanthropie sans interroger sa contribution à la vitalité démocratique.

Lors de notre dernière rencontre du Think Tank de la Philanthropie, Élisabeth Dau, directrice des études de la coopérative Fréquence Commune, a rappelé qu’en France, seulement 2% des fonds et fondations agissent directement en faveur de la démocratie et de la justice sociale.

Pour elle, la philanthropie ne peut plus se concevoir en marge du politique : elle doit devenir un levier du commun, en soutenant les initiatives locales qui réinventent la participation et la gouvernance.

Des expériences issues du néo-municipalisme, de Saillans à Poitiers, prouvent qu’un autre rapport au pouvoir est possible de façon plus horizontale, plus collective et plus incarnée. La philanthropie a joué un rôle important cette décennie en soutenant les expérimentations, la réflexion et la transformation sociale.

À présent, elle appelle ainsi à reconnaître la démocratie comme une cause d’intérêt général, à soutenir les acteurs de la réinvention citoyenne, à démocratiser la philanthropie elle-même et à se structurer. Comme elle le souligne, la démocratie n’est pas un risque pour la philanthropie, mais bien sa condition de légitimité et elle l’incite à assumer sa visée.

Un échange passionnant avec les membres du Think Tank, faisant émerger de nombreuses discussions, aussi bien pragmatiques que teintées d’optimisme.

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Dans un contexte politique traversé par la défiance, où les fondations deviennent à la fois indispensables autant que fragilisées et où le collectif cherche ses repères, la question du rôle de la philanthropie se pose à travers un nouveau prisme. Comment peut-elle contribuer à la démocratie et par quels biais ?

Lors de notre dernière rencontre du Think Tank de la Philanthropie, Élisabeth Dau, directrice des études de la coopérative Fréquence Commune, a partagé un constat saisissant : en France, seulement 2 % des fonds et fondations agissent directement pour la démocratie et la justice sociale. 

Pour elle, la philanthropie ne peut plus rester dans une posture d’observatrice bienveillante. Elle doit redevenir un levier du commun, une force d’expérimentation démocratique à part entière. De Saillans à Poitiers, les initiatives issues du néo-municipalisme montrent qu’un autre rapport de gouvernance est possible : plus horizontal, plus collectif et plus incarné. Ces expériences rappellent qu’il existe, au cœur des territoires, une énergie démocratique qui ne demande qu’à être reconnue et soutenue. 

La philanthropie a déjà accompagné ces dynamiques, en étant pionnière d’expérimentations sociales, en favorisant la rencontre et la diffusion des idées. Mais, selon Élisabeth Dau, elle promeut une nouvelle ère et appelle à reconnaître la démocratie comme une cause d’intérêt général à part entière, soutenant celles et ceux qui la réinventent au quotidien. La philanthropie doit également se démocratiser elle-même en ouvrant ses gouvernances et ses décisions.

Elle souligne enfin que derrière les enjeux politiques, souvent associés aux risques, il y a des enjeux de vivre ensemble, de justice sociale et de transformation écologique. Autant de terrains où la philanthropie a vocation à être un acteur éthique, de lien et en adéquation avec sa raison d’être.

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Comment repenser la place de la philanthropie dans une démocratie marquée par des crises multiples ? Comment l’inscrire dans une dynamique plus ouverte, plus participative, en lien avec les acteurs soucieux de l’intérêt général ?

À l’occasion de la dernière rencontre du Think Tank de la Philanthropie, l’Institut Pasteur a accueilli Suzanne Gorge et Jean-Marie Bergère, tous deux co-auteurs du rapport sur la rôle et la place de la philanthropie dans une démocratie publié en 2022. Trois ans après la publication, ils ont partagé l’actualisation de leurs analyses et leur éclairage sur la situation actuelle en France, dans un contexte géopolitique bouleversé.

Tout au long de l’échange, ils ont mis en lumière les conditions d’une philanthropie à la fois plus légitime et plus structurée : gouvernance élargie, dialogue avec les pouvoirs publics, professionnalisation du secteur, mais aussi une plus grande capacité à expérimenter de nouvelles approches face à des défis complexes.

Leurs propositions visent à permettre l’émergence d’une philanthropie en meilleure interaction avec la société, connectée aux réalités de terrain et capable d’agir sur les causes profondes des fractures sociales qui prennent de l’ampleur. Et ce, en insufflant un élan d’optimisme et plus d’engagement.

Loin d’être un simple geste de générosité, la philanthropie est aussi un acte politique. Dans un contexte marqué par de fortes tensions sociales, économiques et géopolitiques croissantes, aussi bien en France qu’à l’international, la place et le rôle de la philanthropie sont aujourd’hui nécessairement interrogés. 

En 2022, Terra Nova publiait un rapport pour éclairer les enjeux de légitimité, de gouvernance et d’efficacité du secteur philanthropique au sein d’une démocratie. Trois ans plus tard, lors de notre dernière rencontre du Think Tank de la Philanthropie, Suzanne Gorge, directrice adjointe de Terra Nova, et Jean-Marie Bergère, membre du comité Acteur du changement, ont partagé leur vision sur l’évolution du secteur.

Le constat demeure partiellement inchangé : les deux visions antagonistes subsistent avec d’un côté, une philanthropie perçue comme vertueuse, porteuse de transformation sociale et complémentaire à l’action publique. De l’autre, celle d’une privatisation de l’intérêt général, parfois perçue comme contournant les mécanismes démocratiques. Entre ces deux pôles, plusieurs leviers d’action émergent tels qu’encourager une philanthropie plus participative, en valorisant les petits donateurs ; promouvoir une gouvernance plurielle et élargie, en y intégrant les bénéficiaires ; sensibiliser les acteurs publics et favoriser l’expérimentation sociale ou encore, instaurer un dialogue en continu avec l’État afin d’articuler au mieux les complémentarités. Enfin, la professionnalisation du secteur apparaît comme un enjeu indéniable pour assurer la qualité et la pérennité des actions menées.

Alors que le socle social est fragilisé, que les moyens publics se resserrent, la philanthropie devrait ainsi être amenée à se structurer, se positionner et s’engager. Non pas pour se substituer à l’État, mais pour contribuer à faire face aux grands défis collectifs, en adoptant une approche systémique. Une discussion passionnante en tandem, suscitant de nombreux débats avec les membres du Think Tank, à forte résonance avec l’actualité.

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Comment intégrer de manière structurelle les enjeux environnementaux dans les pratiques philanthropiques, indépendamment de la cause soutenue ? 

S’il y a bien un secteur pluriel, c’est celui de la philanthropie. Les missions et combats sont aussi variés que les modalités d’actions. Pourtant, il y a une problématique universelle qui prédomine : l’empreinte environnemental qu’elle génère. Les actions philanthropiques doivent la prendre en compte et tenter de la réduire. Et celle-ci ne se limite pas aux organisations où la mission même est d’agir afin de protéger l’environnement.

Le Think Tank de la Philanthropie a reçu Guillaume Decitre, philanthrope au parcours étonnant, qui intègre la dimension de responsabilité environnementale dans son combat pour la culture.

Après un début de carrière dans le domaine des technologies d’innovation, c’est lors d’un demi-tour du monde à la voile qu’il prend conscience des enjeux environnementaux. Par la suite, en dirigeant les librairies Decitre, il engage plusieurs initiatives philanthropiques avec la volonté constante de promouvoir l’accès à la culture.

Un échange passionnant et inspirant, où Guillaume Decitre illustre diverses actions philanthropiques entreprises, avec l’association Lire et Sourire, ou encore avec la Coalition française des fondations pour le Climat.

Philanthrope au parcours singulier, Guillaume Decitre amorce en 2006 un tournant personnel lors d’un demi-tour du monde à la voile, qui ancre sa prise de conscience des enjeux environnementaux. De retour en France, il prend la direction des librairies Decitre, puis fonde Vivlio, acteur majeur du livre numérique. Depuis, il développe des initiatives philanthropiques promouvant l’accès aux livres et à la culture.

À l’occasion du dernier Think Tank de la Philanthropie, Guillaume Decitre a partagé une réflexion essentielle : comment faire évoluer notre modèle de société vers une plus grande implication citoyenne face aux défis écologiques et sociaux ? Quels leviers pour concilier impact local, sobriété écologique et pérennité des actions ?

À travers ses engagements, il démontre que cette intégration est possible, mais aussi nécessaire pour faire face aux enjeux environnementaux. Tout au long de l’échange, il porte la conviction que si la philanthropie adopte cette exigence écologique, elle peut jouer un rôle d’entraînement. En montrant l’exemple, elle ouvre ainsi la voie à une dynamique vertueuse, susceptible d’inspirer d’autres secteurs et d’être moteur de transformation collective.

Une discussion passionnante avec les membres du Think Tank, où Guillaume Decitre illustre diverses actions philanthropiques, avec l’association Lire et Sourire, ou encore avec la Coalition française des fondations pour le Climat.

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Depuis 2009, Christophe Poline est directeur des investissements solidaires au sein du programme Corporate Citizenship de Schneider Electric. Après avoir mis en place le système d’épargne salariale solidaire de l’entreprise en France, il en gère le volet solidaire. Ce fonds investit principalement en France et en Europe dans des entreprises solidaires luttant contre la précarité énergétique. En 2015, il a piloté la création d’un fonds d’impact de 75 millions d’euros dédié à l’électrification rurale en Afrique Subsaharienne, en partenariat avec d’importantes banques de développement européennes. Enfin, en 2019, il a lancé un véhicule financier visant à améliorer l’accès à l’énergie en Asie du Sud et du Sud-Est.

Durant son intervention au Think Tank de la Philanthropie, il est revenu sur les différents volets de ces programmes, en soulignant notamment l’importance du travail en synergie entre la fondation de l’entreprise et l’activité des fonds à impact. L’investissement solidaire n’est pas le seul levier d’engagement de l’entreprise : comment Schneider Electric articule ses actions, en alliant une approche locale et des initiatives à portée mondiale.

Une discussion passionnante qui a permis de mieux comprendre l’approche de l’entreprise en matière de création de partenariats entre ses fonds à impact et des banques d’investissement.

 Christophe Poline est directeur des investissements solidaires chez Schneider Electric depuis 2009. Après avoir mis en place le système d’épargne salariale solidaire de Schneider Electric en France, il en assure la gestion du volet solidaire, qui investit en France et en Europe dans des entreprises luttant contre la précarité énergétique. Il a également piloté la création d’un fonds d’impact pour l’électrification rurale en Afrique subsaharienne et lancé un véhicule destiné à l’accès à l’énergie en Asie du Sud et du Sud-Est.

En 2009, 1,2 milliard de personnes dans le monde n’avaient pas accès à l’électricité. Aujourd’hui, 800 millions de personnes sont en situation de précarité énergétique. Cette situation dépasse l’enjeu financier car elle affecte également la santé, la vie sociale, la réussite scolaire des enfants et, plus globalement, le retour à l’emploi.

Ce mardi 11 février, Christophe Poline est revenu, lors de la rencontre du Think Tank de la Philanthropie, sur les différents volets de ces programmes. Au-delà des ressources financières dont dispose Schneider Electric, il est essentiel de nouer des partenariats locaux pour développer des fonds et investir dans des structures qui permettent d’élargir les investissements, d’améliorer la connaissance des enjeux territoriaux et de favoriser le développement d’instruments, en s’appuyant sur une énergie plus propre.

En prolongement des logiques d’investissement, Christophe Poline a souligné l’importance du travail en synergie entre la Fondation Schneider Electric et l’activité des fonds à impact, puisque ces deux leviers de financement contribuent conjointement à la résolution de problématiques aussi bien en France qu’en Afrique subsaharienne et en Asie de l’Est.

Une discussion passionnante avec les experts du Think Tank pour mieux comprendre comment Schneider Electric s’est imposée comme une entreprise pionnière en matière de fonds à impact.

 

Après une quinzaine d’années entre la Sillicon Valley et Londres dans le monde des startups et de la venture philanthropy, Cédric Sellin investit désormais dans des startups techs en France et aide le secteur associatif à utiliser la tech pour avoir plus d’impact social. Il fait également partie du comité d’investissement du fonds Phiture et du fonds d’investissement à impact opéré par Citizen Capital

 

Durant son intervention au Think Tank de la Philanthropie, il est revenu sur son parcours professionnel, mais surtout sur les associations et entrepreneurs qu’il a pu accompagner et conseiller, grâce à l’implication des startups techs, dans le secteur philanthropique.

 

Entre le for profit et non profit : quels enseignements et pratiques peuvent être applicables à ces deux secteurs pour favoriser et pérenniser les projets à impact ?

 

C’est ce dont nous avons discuté avec Cédric Sellin, lors d’une rencontre enrichissante et inspirante !

 

 

[Podcast] Le Think Tank de la philanthropie · Cédric Sellin – Du monde des startups à celui de la philanthropie

Pascal Vinarnic est le fondateur de la Fondation Demeter, qu’il crée en 1994, afin d’œuvrer à la réinsertion des personnes en situation de handicap, des jeunes à risque et anciens prisonniers. La fondation, entre autres, soutient des initiatives pilotes pour donner aux personnes sortant de prison les moyens de s’insérer économiquement, socialement et culturellement, tout en faisant en sorte de pérenniser ces projets par une véritable autonomie financière et par la promotion de leur généralisation.

Ce jeudi 12 septembre, Pascal Vinarnic est revenu, lors de la rencontre du Think Tank de la Philanthropie, sur les différents modules de la finance et les outils de mesure d’impact dans le secteur de la philanthropie.

Un échange passionnant partagé avec les experts du Think Tank, pour faire émerger les bonnes idées et pratiques au service du bien commun. Bonne écoute !

 

[Podcast] Le Think Tank de la philanthropie · Pascal Vinarnic – Des outils pour la Philanthropie